Albin Michel - 648 pages
16/20 Désillusions grecques
Dans les somptueux décors de pinède et d'eau cristalline, le jeune homme, en explorant l'île, découvre une magnifique demeure dont le propriétaire l'invite. Maurice Conchis, un homme très riche qui se dit médecin, va alors insidieusement établir son emprise sur Nicholas. Celui-ci est ainsi convié tout d'abord à déjeuner puis, plus tard, à séjourner des week-ends durant dans la propriété surplombant la plage. Petit à petit, il découvre que le propriétaire de la villa n'est pas seul et fait la connaissance de deux très belles sœurs jumelles : Julie et June.
Sous le charme total de Julie, le jeune anglais se laisse entraîner dans des expériences psychologiques orchestrées par Conchis. Des phénomènes étranges apparaissent tels que des mises en scène très réalistes de situations passées ou improbables. Tentant de démêler le vrai du faux, Nicholas se heurte aux réponses toujours fuyantes et mystérieuses de ses hôtes, Julie et Conchis, maîtres dans l'art de brouiller les pistes. L'île paradisiaque devient alors une sorte de prison psychique où le réel est difficile à cerner, où l'attrait irrésistible pour la magnifique Julie est un piège auquel il devient impossible de se soustraire...
Ce roman qui se déroule dans les années 50, peu après la guerre que l'auteur met d'ailleurs en scène, demeure très moderne dans son propos et sa construction.
L'écriture est élégante, précise et réfléchie. L'ambiance générale du récit est pleine d'un charme qui invite le lecteur à rêver dans un monde distant géographiquement et temporellement. Je pense en particulier aux magnifiques pages décrivant l'escapade amoureuse sur le continent grecque de Nicholas et Alison. Ce passage touche à la perfection car tout y est : les décors de carte postale, le romantisme et l'insouciance des personnages, le raffinement des rencontres et des descriptions.
Dans ce cadre idyllique règne cependant une ambiance magnétique, légèrement angoissante et surtout totalement mystérieuse.
Le thème dominant de la manipulation psychologique est très plaisant. Quelques scènes très suggestives viennent renforcer ce sentiment d'ensorcellement qui touche le narrateur. Cependant, la compréhension générale est rendue assez difficile par une fin laissant grandes ouvertes des portes. Certes, j'aime quand l'auteur ne mâche pas tout le travail et laisse au lecteur le soin de terminer le puzzle à partir des pièces présentes dans le livre. J'apprécie aussi dans certains cas une fin ouverte propice à différentes interprétations et rêvasseries. Ici, cependant, la solidité de la majeure partie de l'histoire m'avait laissé entrevoir un dénouement plus construit, plus argumenté, plus clair. Je n'ai malheureusement pas réussi à saisir les véritables objectifs du mage Conchis.
Peut-être faudrait-il relire ce roman dont l'ambiance n'est pas sans rappeler celle des films Le prisonnier, Eyes wide shut ou encore Under the silver lake ?
[Critique publiée le 10/03/23]
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